Une parole destinée aux apprentis comédiens

photo : Alexandre Barbe

Pour leurs travaux de fin d’année, les élèves de la classe d’art dramatique du conservatoire de Rouen se sont plongés dans deux fables, Zone à étendre et Les Désordres imaginaires de Mariette Navarro, qui résonnent étrangement avec quelques épisodes d’une actualité brûlante. C’est à voir du 27 au 29 juin au théâtre des Deux-Rives à Rouen.

Toute ressemblance avec des événements et certaines personnes du milieu politique serait-elle vraiment fortuite ? La coïncidence est néanmoins surprenante. Pour Edgar, il est « bien que le théâtre fasse réfléchir le public. Nous sommes dans une actualité brûlante et c’est une occasion de faire réagir ». Alexandre n’oublie pas que « des idées ont marqué l’histoire de l’Europe. Aujourd’hui, un parti veut la disparition du régime des intermittents. Cela nous touche ». Quant à Guillaume, il préfère être dans le rôle de « conteur. Si je monte sur scène, c’est pour raconter des histoires. Il est vrai le contexte actuel se rattache à ces pièces et permet de faire passer des messages ».

Edgar, Alexandre et Guillaume sont trois des vingt élèves de la classe d’art dramatique du conservatoire de Rouen. Tous sont au théâtre des Deux-Rives pour trois représentations de deux textes de Mariette Navarro, Zone à étendre et Les Désordres imaginaires ou La Destruction du pays par le jeune président à la mode, écrits pour de jeunes comédiens et comédiennes. Dans le premier, un groupe de personnes décide d’aller s’installer dans une forêt pour vivre en communauté. Toutes se feront déloger par l’armée. Le second, au titre prophétique, raconte l’histoire d’une troupe d’artistes en pleine création après avoir répondu à un appel à projets. Face à elle, le pouvoir en place, autoritaire, cherche à modeler l’imaginaire de la population.

« C’est flippant »

Les pièces entre les mains, les trois apprentis comédiens ont la même réaction. « C’est flippant ». « Il y a un impact avec ce que nous vivons. Chaque groupe a ses idées et campe sur ses positions. Nous parlons aujourd’hui d’idées extrêmes. Mariette Navarro évoque cela », remarque Alexandre. « « On ne prend pas les artistes au sérieux mais pour des clowns. Cela va jusqu’à la répression alors qu’ils sont innocents », ajoute Edgar.

Guillaume endosse le rôle d’un des deux présidents. Si l’un se révèle plus autoritaire, lui le présente comme « un beau parleur qui se fait cependant manipuler par ses conseillers. C’est une marionnette qui sait construire de belles phrases ». Alexandre est un surveillant « inquiétant » et Edgar, un artiste. « Nous nous inspirons de nous-mêmes. C’est presque une mise en abîme ».

Avec ces deux pièces de théâtre, Caroline Lavoinne, metteuse en scène et professeure, a souhaité revenir à la littérature française avec la langue si singulière de Mariette Navarro. Chez cette autrice, pas de distribution de rôle, pas de ponctuation non plus. « Cela autorise à inventer. Son écriture est très poétique mais sans fioriture. Les phrases sont courtes et incisives ». Pour ces travaux de fin d’année, les élèves ont dû trouver un rythme et construire un univers. Un bel exercice.

Infos pratiques

  • Jeudi 27 et vendredi 28 juin à 20 heures, samedi 29 juin à 18 heures au théâtre des Deux-Rives à Rouen
  • Spectacle gratuit
  • Réservation au 02 35 70 22 82 ou à billetterie@cdn-normandierouen.fr
  • Aller au théâtre en transport en commun avec le réseau Astuce